La gestion collective : un outil moderne pour une rémunération équitable


Mémoire au Comité permanent du patrimoine canadien concernant les modèles de rémunération pour les artistes et les créateurs

Copibec et la gestion collective

La société québécoise de gestion collective des droits de reproduction, Copibec, est un organisme à but non lucratif créé par la collectivité des auteurs et des éditeurs du Québec sur des principes d’équité. Son conseil d’administration est composé de représentants de regroupements québécois d’auteurs (écrivains, journalistes et créateurs en arts visuels) et d’éditeurs (livres, revues, journaux).1 Il se réunit chaque mois afin de veiller aux intérêts des titulaires de droits et de prendre les décisions relatives à la gestion de leurs droits de reproduction ainsi qu’au développement des services. Au fil des ans, ces représentants ont su faire évoluer leur société de gestion afin de l’adapter aux nouveaux besoins des utilisateurs d’oeuvres.

Ainsi, pour répondre à l’arrivée des supports de reproduction numériques, ils ont confié à Copibec la gestion de nouveaux droits permettant des utilisations telles que la projection en classe, la numérisation ou l’utilisation de plateformes pédagogiques. Copibec offre ainsi aux utilisateurs la possibilité de payer les droits d’auteur par le biais d’une licence générale annuelle ou d’autorisations ponctuelles pour des utilisations traditionnelles et numériques. Copibec a également développé un service web permettant aux utilisateurs de demander des autorisations et de payer les redevances, mais également de déclarer les reproductions effectuées dans le cadre des licences annuelles. Ce service web a également permis d’accélérer le traitement des données reçues et le paiement des redevances aux titulaires de droits.

La société de gestion a aussi développé des services numériques spécifiques répondant aux besoins du milieu éducatif tels que DONA qui, en partenariat avec certains éditeurs, permet aux établissements d’enseignement d’acquérir une oeuvre sur un support numérique adapté aux besoins des élèves ayant une déficience perceptuelle. Elle a aussi développé la plateforme SAMUEL qui depuis 2014 permet à Copibec et ses partenaires d’offrir aux écoles et collèges québécois, mais également aux établissements d’enseignement hors Québec, un accès à des contenus francophones canadiens diversifiés et de qualité.

Copibec gère les droits de plus de 27 000 auteurs, journalistes et artistes d’arts visuels, de même que ceux de quelque 1000 éditeurs québécois. Le répertoire géré par Copibec a également une envergure internationale grâce aux ententes de réciprocité avec 33 sociétés de gestion étrangères. Copibec perçoit ainsi les redevances dues lors de l’utilisation des oeuvres québécoises à l’étranger. Les sommes ainsi collectées sont remises directement aux auteurs, journalistes et artistes d’arts visuels et aux éditeurs québécois après déduction des frais de gestion2.

La gestion collective constitue un modèle de rémunération efficace, polyvalent, garant d’accessibilité et de diversité culturelle, et mondialement reconnu. Il s’inscrit dans une démarche de modernité et d’avenir d’une société qui investit dans sa culture à l’ère du numérique.

La situation économique des créateurs et de leurs éditeurs

Les résultats d’un sondage3 mené récemment par l’Union nationale des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ), en collaboration avec The Writers Union of Canada (TWUC), démontrent que la situation économique des écrivains québécois demeure très précaire. En effet, seulement 10 à 15% d’entre eux sont en mesure de vivre de leur plume en diversifiant leurs activités afin de cumuler plusieurs sources de revenus4. Le droit de prêt public et la gestion collective des droits de reproduction comptent pour environ 12%5 de ce cocktail.

Du côté des petits et moyens éditeurs québécois, les redevances versées par Copibec représentent en moyenne 18% de leurs bénéfices nets et peuvent, dans le cas de certains éditeurs, atteindre 33,5% de leurs bénéfices nets sur une période de quatre ans. Ces revenus contribuent notamment à faciliter l’investissement des éditeurs québécois dans la publication de nouveaux auteurs, à la poursuite d’activités de publication pour des auteurs oeuvrant dans des créneaux littéraires nichés, ou encore à pérenniser certaines revues spécialisées locales.

Ainsi, dans un marché aussi restreint et singulier que le nôtre, les revenus de droits d’auteur provenant des utilisations secondaires revêtent une importance particulière tant pour les auteurs que pour leurs éditeurs. En novembre 2018, Copibec a remis aux auteurs et éditeurs participant aux licences de gestion collective avec les établissements d’enseignement plus de 7,3 millions de dollars. 2202 auteurs québécois ont ainsi reçu des chèques dont le montant varie de 100$ à 35 000$.

Le respect des droits d’auteur demeure donc essentiel à la poursuite des activités de création des auteurs et à la survie de l’industrie de l’édition. Les quelque 200 millions de dollars remis aux auteurs et aux éditeurs par Copibec au cours de ses vingt ans d’existence soutiennent activement la pérennité de ce secteur culturel.

Les modifications de la Loi en 2012

Depuis 2012, nous constatons une multiplication des litiges6 et une érosion constante du droit d’auteur et de la rémunération qui s’y attache. En multipliant les exceptions et en introduisant le mot « éducation » dans l’exception d’utilisation équitable, le gouvernement a ouvert une boîte de Pandore.

À l’époque, les représentants du milieu de l’éducation affirmaient que les modifications proposées visaient simplement à clarifier la Loi et vous assuraient que les titulaires de droits et leurs sociétés de gestion ne perdraient pas de revenusi puisque leurs établissements continueraient de payer les licences pour l’utilisation des oeuvres. Sur la foi de ces affirmations et de celles de professeurs fervents partisans d’un droit d’auteur minimaliste, le gouvernement est resté sourd à nos mises en garde et nous assurait que les modifications proposées n’étaient pas un « chèque en blanc » pour les établissements d’enseignement. Et pourtant…

L’impact de ces modifications à l’extérieur du Québec

Dès janvier 2013, la situation des créateurs et des éditeurs s’est dégradée de façon dramatique. Les universités, les collèges et les ministères de l’Éducation hors Québec ont remplacé les licences de gestion collective par des politiques de reproduction dans lesquelles ils s’autorisent unilatéralement à reproduire des oeuvres, de manière institutionnalisée et systématique, sans paiement de redevances aux titulaires de droits.

Les distributions de redevances d’Access Copyright ont chuté de 80%, ce qui représente, pour les éditeurs canadiens hors Québec, une perte de 16% de leur bénéfice net.

La forte décroissance des redevances distribuées par Access Copyright a également un impact sur les créateurs québécois, puisque Copibec ne reçoit plus d’Access Copyright, afin de les distribuer au Québec, les redevances attachées à l’utilisation massive des oeuvres québécoises dans les établissements d’enseignement canadiens, hors Québec. Ironiquement, Copibec remet aux créateurs québécois des redevances relatives à l’utilisation de leurs oeuvres à l’étranger, mais pas dans le reste du Canada. Cette situation est intolérable.

L’impact de ces modifications sur la rémunération des créateurs au Québec

Soulignons d’entrée de jeu qu’au Québec également, le montant des revenus provenant des licences avec les établissements d’enseignement québécois a fortement diminué (chute de 22%) entre 2012 et 2017, et cela alors même que le nombre d’élèves et d’étudiants étaient globalement en hausse durant cette période.

Si, tout en tenant compte des modifications législatives, le montant de la redevance par élève a été revalorisé lors des négociations avec le ministère de l’Éducation du Québec pour tenir notamment compte de l’élargissement des limites de reproduction, de l’ajout du numérique et de l’inclusion de nouveaux besoins dans la licence, tel n’est pas le cas pour les établissements d’enseignement postsecondaire.

Dans les semaines qui ont suivi l’adoption des modifications à la Loi, les universités québécoises demandaient la renégociation de la redevance de 25,50$ par étudiant, par année, sur laquelle elles venaient de s’entendre avec Copibec pour la période de juin 2012 à mai 2015. Ainsi, dès janvier 2013, la redevance par étudiant, par année, diminuait de 18% passant à 21$ pour une période finissant en mai 2014. Les cégeps suivaient également cette tendance baissière lors des négociations de 2014. Depuis, fortement influencées par l’interprétation extrêmement large des modifications législatives prônée par les établissements d’enseignement hors Québec, chaque renégociation des ententes avec les universités et les cégeps québécois entraîne une nouvelle baisse des redevances. La redevance annuelle par étudiant universitaire a ainsi baissé de près de 50% (passant de 25,50$ en 2012 à 13,50$ en 2017), et celle des cégeps de 15% (passant de 12,40$ à 10,50$). 

En mai 2014, l’Université Laval décidait de suivre le modèle des universités canadiennes et mettait fin à sa licence avec Copibec, forçant ainsi les titulaires de droits à entreprendre une action collective contre elle. Heureusement, en juin 2018, Copibec et l’Université Laval sont parvenues à une entente à l’amiable permettant à toutes les parties impliquées de bénéficier d’un dénouement favorable7.

On pourrait être tenté de croire, ainsi que le suggèrent les représentants du milieu de l’éducation, que la baisse de la redevance par étudiant est le reflet d’une décroissance du volume de copies des oeuvres du répertoire de Copibec. Cependant, les données récoltées et analysées par Copibec démontrent que ce n’est pas le cas. Si le rapport entre le volume de copies reproduites déclarées sous la licence et le montant de la redevance était resté le même entre 2012 et 2016, le montant remis aux auteurs et éditeurs par page reproduite aurait dû rester sensiblement le même. Or, tel n’est pas le cas, puisque la redevance payée aux titulaires de droits pour chaque page copiée par les universités a tout simplement diminué de 23% (figure 2), et ce, bien que Copibec ait maintenu ses frais de gestion à 15%. C’est donc le travail même des auteurs qui est dévalorisée.

Cette constante décroissance des redevances venant du secteur de l’éducation est particulièrement pénalisante pour les revenus en provenance de la gestion collective des créateurs puisque près de 75% des revenus de licence collectés et distribués par Copibec proviennent du secteur de l’éducation (voir figure 3).

Soulignons également que ce sont les auteurs, créateurs et éditeurs québécois qui en sont le plus affectés puisque des quelque 72 millions de copies qui nous sont déclarées annuellement, la majorité provient d’oeuvres québécoises. Nos auteurs subissent de plein fouet cette baisse de revenus alors que leur situation précaire et leur capacité financière de créer se dégradent toujours plus avec tout fléchissement des revenus en provenance d’un des maillons de la chaîne du droit d’auteur. Aujourd’hui, ce sont nos auteurs, nos créateurs, nos éditeurs d’ici qui subissent les effets néfastes de ces modifications. C’est notre culture et l’idée que nous nous faisons de notre patrimoine culturel qui sont en péril.

Si l’interprétation prônée par les universités hors Québec se répandait à l’échelle du Québec, les impacts sur les créateurs et leurs éditeurs seraient très importants. D’autant plus en considérant qu’au primaire-secondaire et au collégial, la plus grande proportion des titres reproduits sont québécois. Ainsi, pour le seul paiement des redevances venant de l’éducation, c’est plus de 2000 créateurs québécois (et près de 500 éditeurs) qui perdraient le montant des redevances payées par Copibec8. Considérant leur situation économique précaire, ces montants font une différence pour nombre d’entre eux.

Les titulaires de droits ont créé Copibec parce que la gestion collective leur donne accès à des revenus qu’ils ne seraient pas en mesure de collecter personnellement. Des revenus indépendants qui revêtent une importance critique en matière de liberté d’expression et de diversité culturelle.

Portrait des oeuvres reproduites : l’expérience québécoise

Tout au long du processus d’examen parlementaire de la Loi sur le droit d’auteur, tant devant votre comité que devant le Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie, les représentants du milieu de l’éducation et leurs experts ont soutenu que les licences de gestion collective les obligeaient à payer en double pour des droits de reproduction qu’ils obtiendraient déjà par le biais des abonnements avec les grands éditeurs de revues scientifiques ou à des plateformes d’agrégateurs numériques. Afin de répondre à ces prétentions, soulignons que Copibec reçoit chaque année, dans le cadre des licences, la déclaration de plus de 40 millions de copies faites par les universités québécoises, plus de 20 millions par les cégeps et plus de 3,5 millions pour un échantillon équivalant à 10% des écoles primaires et secondaires de la province. L’analyse de ces données démontre que la grande majorité des reproductions déclarées proviennent de livres, non de revues, ainsi que l’illustrent les chiffres du paiement éducation de décembre 2017 :

La gestion collective : un système de rémunération des créateurs efficace et à un coût abordable

Prétextant que la gestion collective et le droit d’auteur nuisent à l’accessibilité au savoir et à l’éducation, les établissements d’enseignement refusent de payer leur dû aux titulaires de droits. Pourtant la gestion collective donne accès à un répertoire mondial de millions d’oeuvres et, à la différence d’une interprétation débridée de l’utilisation équitable, elle permet de maintenir le délicat équilibre entre accessibilité et rémunération de titulaires de droits.

13,50$ par étudiant universitaire, 10,50$ par étudiant collégial et 4,29$ par élève du primaire-secondaire, voilà les coûts annuels des licences de Copibec en 2018.

C’est moins de 0,4% des frais de scolarité d’un étudiant universitaire d’un montant annuel moyen de 3500$ (figure 4) et une partie encore plus infime du budget annuel des universités (figure 5). Il faut donc bien méconnaître le système de gestion collective pour prétendre que ces licences sont à l’origine de l’endettement des étudiants, qu’elles mettent en péril l’accès au système éducatif canadien ou qu’elles accaparent le budget des établissements d’enseignement.

Les deux tableaux ci-dessous illustrent la proportion du coût de la licence par rapport aux frais de scolarité annuels moyens d’un étudiant québécois ainsi qu’au budget de fonctionnement d’une université.

Pourtant, faisant fi de ces éléments rationnels, la majeure partie du milieu de l’éducation canadien privilégie la voie de la judiciarisation au détriment de la négociation, poussant les créateurs, les éditeurs et leurs sociétés de gestion vers les tribunaux et leur imposant un fardeau financier qu’ils peuvent difficilement soutenir plus longtemps.

La gestion collective pour un meilleur équilibre

Au cours des derniers mois, les représentants du milieu de l’éducation et divers experts prônant une interprétation toujours plus permissive de la Loi ont témoigné devant vous et le Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie. Ils ont soutenu que le Canada devait aller encore plus loin pour limiter les droits des créateurs et étendre ceux des utilisateurs. Ils soulignent à cette fin la grande latitude qu’offrirait le fair use américain, la nécessité d’introduire en droit canadien les dispositions venant du Royaume-Uni ou de la France qui interdiraient de limiter contractuellement les exceptions ou permettraient d’exercer des recours contre les titulaires de droits qui ne respecteraient pas les droits des utilisateurs.

Mais, ils oublient fort commodément de vous dire que le fair use vient avec un corpus de jurisprudence qui encore dernièrement soulignait que l’on ne peut définir une règle générale fondée sur un pourcentage ou un volume (comme le font les établissements d’enseignement dans leur politique de reproduction) et que l’impact de la reproduction sur le marché est le critère déterminant; que la législation du Royaume-Uni, mais également de l’Irlande et de la Nouvelle-Zélande, contiennent une disposition rendant l’exception d’utilisation équitable inopérante lorsqu’une licence est disponible; que la France a également une disposition limitant la reproduction dans les établissements d’enseignement à des fins d’illustration uniquement et que le paiement de redevances y est attaché.

La gestion collective est l’exercice du droit d’auteur et des droits connexes par des organismes qui agissent au nom des titulaires de droits, dans leur intérêt et celui des utilisateurs. C’est un modèle de gestion des droits moderne, mondialement reconnu et qui a su faire la preuve de son efficacité en conjuguant accessibilité aux oeuvres et rémunération.9 Solution simple et peu coûteuse, la gestion collective fait partie intégrante de la Loi sur le droit d’auteur. Elle est le pivot essentiel d’un régime du droit d’auteur équitable et équilibré et elle ne peut être remplacée par un élargissement indu des exceptions.

Conclusion

L’érosion accélérée du droit d’auteur canadien doit cesser. Il est urgent que le gouvernement affiche son soutien à une culture nationale forte en corrigeant les effets pervers des modifications de 2012. Le gouvernement doit favoriser un dialogue et un équilibre réel entre les auteurs et les utilisateurs, incluant les établissements d’enseignement, en encadrant de façon claire les exceptions. Un équilibre dont la gestion collective est le garant en conjuguant accessibilité et rémunération des auteurs et de leurs éditeurs.

Comme en matière de droit du travail, il est toujours possible de s’inspirer des aspects les plus permissifs et les moins protecteurs des travailleurs dans les législations étrangères. La question est assez simple : Quelle valeur le Canada, collectivement, attache au respect de ses créateurs et au développement d’un milieu culturel sain et innovant? Si c’est un aspect important de notre identité, la Loi devra être révisée afin de mieux protéger les créateurs lors de l’utilisation de leurs oeuvres tout particulièrement lorsque celle-ci revêt un caractère systématique et institutionnel comme dans le cas des utilisations par les établissements d’enseignement. Il ne s’agit pas ici de limiter l’accès aux oeuvres, mais de rétablir l’équilibre difficile entre accès et rémunération.

Nos recommandations

1. Article 29 : Clarifier que l’exception d’utilisation équitable ne s’applique pas aux établissements d’enseignement lorsque l’oeuvre est accessible sur le marché

Il existe à l’article 2 de la Loi sur le droit d’auteur une disposition permettant de favoriser le retour à un équilibre dans les négociations entre les créateurs, par le biais de la société de gestion, et les établissements d’enseignement. Il s’agit simplement d’introduire dans l’article 29 une référence à la définition de « accessible sur le marché » stipulée à l’article 2 de la Loi. L’accessibilité sur le marché, notion déjà utilisée dans la Loi pour promouvoir l’équilibre entre créateurs et utilisateurs institutionnels, est formulée de telle manière qu’elle assure l’accès aux oeuvres sans contraintes excessives et à un coût raisonnable tout en préservant la possibilité pour les créateurs d’être rémunérés. Ainsi, lorsqu’une licence d’une société de gestion peut être obtenue sur le marché canadien, selon les critères établis à l’article 2, l’établissement d’enseignement devra négocier avec la société de gestion. Une telle limitation à l’exercice de l’exception d’utilisation équitable existe également dans des juridictions semblables à la nôtre telles que le Royaume-Uni ou la Nouvelle-Zélande.

2. Revenir à la formulation d’avant 2012 de l’exception de reproduction à des fins pédagogiques et de questions d’examen (Articles 29.4 (1) à (3))

Depuis 2012, l’exercice des articles 29.4 (1) et (2) n’est plus limité par la possibilité d’obtenir une licence octroyée par une société de gestion conformément à l’article 2 alinéa b) de la définition d’accessible sur le marché dans la Loi. Cette modification n’était pas justifiée par le but de l’exception et porte atteinte aux intérêts des créateurs qui ne sont pas en mesure de commercialiser leurs oeuvres sur un support numérique et ne perçoivent donc plus les redevances attachées à ces reproductions.

3. Garantir dans des recours effectifs pour les créateurs.

a) Harmoniser les dommages et intérêts préétablis pour les violations à des fins non commerciales (Articles 38.1 (1) b), 38.1 (1.12) et 38.1 (1.2))

La notion de fins non commerciales n’est pas définie dans la Loi alors que la frontière entre commercialisation et non-commercialisation est de plus en plus fine dans l’environnement numérique. Le montant des dommages et intérêts préétablis dans la Loi (5000 $ au maximum pour toutes les violations, toutes les oeuvres (article 38.1 (1) b)) et tous les titulaires de droits (article 38.1 (1.2)) est tellement faible qu’il ne permet pas aux créateurs d’exercer convenablement leurs recours, ni à créer l’effet dissuasif souhaité ni à encourager les négociations ou les règlements à l’amiable, notamment en cas de violations non commerciales systémiques ou institutionnalisées.

b) Harmoniser les dommages-intérêts légaux offerts aux sociétés de gestion (articles 38.1(4) et 67).

Nous avons été déçus que les réformes récentes visant à moderniser la Commission du droit d'auteur n'aient pas étendu les dommages-intérêts légaux à toutes les sociétés de gestion. Aucune raison ne justifie pourquoi les musiciens et les auteurs-compositeurs devraient avoir les moyens de s'assurer qu'ils sont rémunérés pour l'utilisation de leur travail, contrairement aux auteurs et aux artistes visuels. En accordant à toutes les sociétés le droit d’avoir accès aux dommages-intérêts légaux, les tarifs certifiés par la Commission du droit d’auteur auront un sens et garantiront aux auteurs, aux artistes visuels et aux éditeurs une rémunération lorsque leurs oeuvres sont copiées conformément à ces tarifs.

Annexes

  1. Union nationale des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ), Association nationale des éditeurs de livres (ANEL), Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ), Les Hebdos du Québec, Les Quotidiens du Québec, Regroupement des artistes en arts visuels du Québec (RAAV), Société de développement des périodiques culturels québécois (SODEP).
  2. Les frais de gestion sont déterminés par le conseil d’administration de Copibec et se sont maintenus à 15% des redevances perçues depuis de nombreuses années.
  3. UNEQ, Le métier d’écrivain en voie de disparition au Québec comme au Canada, données sur les revenus des écrivaines et écrivains québécois en 2017, novembre 2018. Pour consulter les résultats de ce sondage, visiter le https://www.uneq.qc.ca/wp-content/uploads/2018/11/Resultats_sondage_UNEQ.pdf
  4. Ibid., p.5, Les sources de revenus d’écriture en 2017
  5. Idem.
  6. Citons par exemple les cas de Access Copyright c. York University, Copibec c. Université Laval, et plus récemment un recours intenté par le Conseil des ministres de l’Éducation des provinces contre les auteurs et éditeurs représentés par Access Copyright demandant un remboursement de redevances payées aux titulaires de droits pour les utilisations de leurs oeuvres. https://publishingperspectives.com/2018/02/canada-access-copyright-sued-by-education-sector/
  7. https://www.copibec.ca/fr/nouvelle/194/fin-du-litige-entre-copibec-et-l-universite-laval-en-matiere-de-droit-d-auteur 
  8. En 2018, le montant de ces chèques pour les créateurs québécois allait de 100$ à 35 000$.
  9. C’est pour l’UNESCO le moyen de favoriser « l’exploitation licite des oeuvres et prestations culturelles » et « un élément essentiel de construction d’un système national moderne de protection du droit d’auteur, capable de concourir efficacement à la dynamique du développement culturel. », UNESCO, Guide sur la gestion collective des droits d’auteur, 2000, Paula Schepens, p.9