Où en sommes-nous avec l’intelligence artificielle ?


Où en sommes-nous avec l’intelligence artificielle ?


E
ntretien avec Céline Castets-Renard, professeure titulaire à l’Université d’Ottawa, Section de droit civil, Faculté de droit Chaire de recherche de l’Université sur l’intelligence artificielle responsable à léchelle mondiale.


Céline Castets-Renard était, le 26 mars dernier, en visioconférence avec les employé⋅es de Copibec et des membres du conseil d’administration afin de présenter un portrait de l’intelligence artificielle qui peut certainement être qualifié de déferlante.

L’intelligence artificielle, depuis l’arrivée de ChatGPT dans les chaumières, s’est emparée de l’espace public

La définition même de l’intelligence artificielle peut être polysémique. Les scientifiques et les juristes n’ont pas la même. L’intérêt de la qualification pour les juristes réside dans ldétermination du régime juridiqueL’Organisation de coopération et de développement (OCDE) a défini l’IA et l’on voit une certaine convergence à l’échelle internationale, puisque la définition de l’OCDE a été reprise aux États-Unis, en Europe et au Canada.  

On peut dire que l’IA est un système automatique entre les humains et une machinqui détient un certain degré d’autonomie, qui est adaptable à son environnement, capable d’atteindre des objectifs implicites ou explicites et qui possède des capacités cognitives. 

 
L’IA générative est une sous-catégorie de l’IA, dont on parle depuis l’avènement de ChatGPT. Il s’agit d’IA à usage général, c’est-à-dire que l’on peut utiliser pour faire diverses choses.

Il va falloir trouver un équilibre entre les bienfaits et les risques. C’est ce que l’on doit avoir en tête en réglementant l’IA 

On sait qu’il faut beaucoup d’œuvres pour entraîner les systèmeset cela est problématique en ce qui concerne la propriété intellectuelle. Ce n’est là qu’un des risques identifiés. La question des différents biais est également préoccupante. Il y aussi des bienfaits, il faut le mentionnerOn pense notamment à l’imagerie médicale, par exemple.

Un vocabulaire autour de l’IA est aussi à développer. Mentionnons l’apprentissage profond, souvent appelé «deeplearning»Il s’agit d’une méthode basée sur une énorme quantité de données qu’on fournit à une machine, sans lui donner tout le cheminement qui a mené à leur production. Ce n’est qu’une des expressions qui commencent à apparaître lorsqu’on discute d’IA. La complexité de cette terminologie émergente fait parfois obstacle à la compréhension du public de ce qu’est l’IA.

Par ailleurs, ce qui est ressorti nettement de notre échange est le fait que l’intelligence artificielle a et aura un impact sur l’ensemble des activités humaines et que les premières tentatives de régulation n’ont pas fait de lien entre IA propriété intellectuelle.

Il faut aussi spécifier qu’il y a de nombreuses initiatives internationales, nationales et régionales.

Il s’agit parfois de principes généraux, de textes qui sont donc non contraignants. Osonge, par exemple, au décret présidentiel qu’a fait adopter le président Biden.

L’encadrement législatif de l’intelligence artificielle n’est pas aisé et les progrès étant très rapides, on tente de proposer des textes législatifs qui pourront ne pas devenir trop rapidement obsolètes.

Nous avons souvent plus de questions que de réponses, mais il nous faut certainement être à l’affût de l’ensemble des initiatives.


Union européenne 

C’est l’Union européenne qui a légiféré la première sur cette imposante matière. La mise au monde du texte a pris trois bonnes annéesce qui n’est pas étonnant étant donné la complexité de la tâche et la pluralité des voix. Il s’agit d’une approche globale basée sur les risques. Il faut mentionner l’importance de la notion de transparence concernant l’IA à usage général. 

L’action législative canadienne 

Le Canada a quant à lui déposé un projet de loi en juin 2022, le projet de loi C-27 
 
C’est la troisième partie de cette législation, partie dénommée Loi sur l’intelligence artificielle et les données (LIAD), qui s’intéresse plus particulièrement à l’IA et on ne s’étend pas sur le droit d’auteur 
 
Amendements demandés :  

La transparence est une notion-clé dans ce dossier et rappelons qu’ici aussi c’est l’intelligence artificielle dans son ensemble que l’on englobe. Pour le bénéfice des lecteurs, précisons qu’à l’automne 2023, le gouvernement a lancé une consultation sur l’intelligence artificielle générative concernant la Loi sur le droit d’auteur.

La gestion collective 

Une société de gestion collective telle que Copibec aura un rôle à jouer dans ce futur qui est à se dessiner pour les créateurs. Ainsi, les liens entre la Loi sur le droit d’auteur et le projet de loi C-27 sont importants dans la mesure où la LIAD aura un impact, notamment quant à la question de la transparence et la façon dont on transpose concrètement ces obligations.

Et le Québec 

Le Québec est aussi interpellé par l’intelligence artificielle. Le Conseil de l’innovation du Québec a publié un rapport « Prêts pour l’IA ». Un rapport portant sur la souveraineté culturelle a aussi été produit. Il faudra suivre les développements à venir à ce sujet. Il est clair que le gouvernement québécois désire investir ce terrain.



L’intelligence artificielle générative arrive en trombe
, pose des questions fondamentales.

I
l nous faut être à la table car il semble bien que ce soit à grande vitesse que se font les avancées. Les questions se posent à l’échelle mondiale et le changement de paradigme auquel nous assistons pose de très nombreux enjeux. Plusieurs recours dans nombre de juridictions sont également en cours.

S
uivre les développements en lien avec le droit d’auteur s’avère d’une importance capitale que ce soit au niveau législatif qu’au niveau des décisions rendues par les tribunaux.